jeudi 29 mars 2007

Sorj, combattant de la plume

Vendredi 2 février. 15h30. Sorj Chalandon vient de quitter Libération. Après trente années passées au quotidien. Sans pot de départ. Sans même prévenir le standard. Il est parti par fidélité. Fidélité depuis toujours à ses engagements. A son chef, Serge July. « Le baron Rothschild veut une vraie rupture avec l’époque July. Sans moi. July était mon chef. Je suis un soldat, on licencie mes généraux, je m’en vais ».

Mais il s’en va aussi parce qu’il ne supporte pas les changements d’une presse qui va mal. « Le quotidien national d’information tel qu’il existe est appelé à disparaître. On appartient à un monde mort. Je ne me suis pas battu toute ma vie pour être payé par la publicité. Ce qui est en train de se passer ne me convient pas. C’est très difficile, mais c’est mon choix ».

Issu d’un milieu modeste, une mère employée de bureau et un père sans emploi après une blessure lors de la deuxième guerre mondiale, Sorj s’est engagé très tôt dans la lutte. Il adhère au mouvement d’extrême-gauche, d’essence maoïste, la Gauche prolétarienne. Première rencontre avec Serge July. Il côtoie les militants de la branche clandestine, La nouvelle résistance populaire, responsable de l’enlèvement de l’un des patrons de Renault. Pour ces « vrais communistes », comme il se définissent eux-mêmes, rien ne peut se faire sans l’action. Ils veulent l’insurrection armée. Alors étudiant en histoire, Sorj quitte l’université et devient ouvrier à l’usine chimique Rhodia Seita à Vayze. Mais 1972 sonne comme un tournant. Pierre Overney, ouvrier chez Renault, est tué par un vigile, alors qu’il distribuait des tracts pour une manifestation anti-racisme. En septembre, le commando Septembre noir prend en otage la délégation israélienne lors des Jeux Olympiques de Munich. Ces deux évènements lui font prendre conscience que le terrorisme ne mène à rien, que la lutte armée conduit à l’impasse. « La masse ne nous suivait pas ». Ces combattants contre la classe dominante se retrouvent « orphelins d’idéologie ».

Serge July décide alors de fonder le journal Libération en février 1973. Sorj le rejoint en septembre, comme dessinateur et monteur de page à la fabrication. Il a 21 ans. La même année, il part en Syrie, où il couvre, monté sur le premier char des forces syriennes, l’entrée dans la ville de Kuneitra reprise à Israël. Il vient de faire ses preuves, et devient reporter au service informations générales. Il y traite d’affaires de police et de justice. Olivier Bertrand, qui a travaillé avec lui dans le même service, se souvient d’un homme particulièrement sensible aux autres : « De tous les journalistes de Libération, Sorj est l’un des plus attentifs aux gens. Il a une vraie attention humaine, ce qui paraît assez rare pour quelqu’un qui est dans la même entreprise depuis trente ans ».

En 1980, il rejoint le service « monde ». En 1981, le président égyptien Anouar el-Sadate est assassiné au Caire. Sorj est disponible, et part. Sa carrière de grand reporter est lancée. Pendant vingt ans, il va couvrir tous les conflits qui secouent la planète : le Liban, l’Iran, l’Irak, la Somalie, l’Afghanistan, le conflit nord-irlandais. « Il n’y a pas d’école de grand reporter. Tu es grand reporter dans l’usage que tu fais de la chance que l’on te donne. J’ai eu la chance d’être choisi et d’avoir la confiance de mon journal. La rédaction pouvait compter sur mon écriture, ma disponibilité et mon envie de me confronter au pire : la guerre ».

En 1988, il reçoit le Prix Albert Londres, et rejoint ainsi le panthéon des grands reporters distingués par ce prix. « Le paradoxe, c’est que j’ai eu ce prix pour le procès de Klaus Barbie, qui se déroulait à deux heures de Paris ».

Et demain ? « Je suis trop étiqueté Libé, trop emblématique de ce journal, j’ai eu le Prix Albert Londres, c’est trop lourd ». Sans illusion, il est passé à l’écriture, pour combler un manque. Journaliste le jour, il devient écrivain quand la nuit tombe. En 2006, il reçoit le Prix Médicis pour son deuxième roman, Une promesse. « J’écris ce qui me manque la nuit, ce qui manque au journaliste et à l’homme : le respect, l’écoute, la fraternité. Écrire la nuit donne une écriture différente, particulièrement apaisée. Cela me permet d’inventer un autre monde. Je suis entré en journalisme pour lutter, dans l’écriture romanesque pour rêver ». Il vient de signer son contrat pour ses deux prochains romans. De quoi occuper ses prochaines nuits. Il lui reste à combler ses jours.

vendredi 9 mars 2007

« On ne va pas tout résoudre »

Sur les bords du canal Saint-Martin, deux mois après la spectaculaire opération de montage des tentes par les Enfants de Don Quichotte, les sans-abri sont toujours là, provoquant le mécontentement de certains riverains.

Mardi 20 février, 18h. La nuit commence à tomber sur les bords du canal Saint-Martin, où une centaine de tentes rouge, bleu ou beige sont toujours alignées. Le 8 janvier, Catherine Vautrin, ministre déléguée à la Cohésion sociale, avait pourtant annoncé la mise en place d’un plan de 70 millions d’euros. Celui-ci prévoit l’élargissement des horaires des centres d’hébergement d’urgence et 10 000 places de plus d’ici à la fin 2007 pour des logements de plus de trois mois.

Les réactions des commerçants riverains du canal sont mitigées quant à cette situation qui perdure. Si Somali, la jeune vendeuse du magasin Quai 71, estime « qu’ils ne dérangent pas », Arnaud, serveur au restaurant Chez Prune, à l’angle de la rue Beaurepaire et du Quai de Valmy, considère qu’une minorité est la cause de troubles. « Les gens qui restent sont des gens qui ont soit des problèmes cliniques, soit des problèmes d’alcoolisme ou de drogue. Certains sont durs à gérer. Dans le lot, il y en a une dizaine de durs, qui agressent les gens quand ils passent et créent une mauvaise ambiance ». Depuis la mise en place d’un service de sécurité qu’il qualifie « d’efficace », il estime que « ça va mieux ». « Tant qu’ils ne nous empêchent pas de bosser », conclut-il. A voir le monde qui se presse dans ce restaurant à l’ambiance tamisée, les sans-abri déjà bien imbibés n’empêchent effectivement pas les Parisiens de sortir.

De l’autre côté du canal, le gérant du salon de coiffure Rock-Air Cut est plus agacé. « C’est gonflant. Ils sont bourrés tous les jours. Parfois ils se battent, et j’en ai alors un qui vient me demander de l’eau ». Montrant le petit pont qui enjambe le canal, il poursuit : « Lui là-bas, il a deux chiens, alors il ne veut pas aller en appartement. Ce sont des paumés, il faut leur réapprendre à bosser. Et puis tout ça, c’est du cinoche pour moi. Toutes les tentes n’étaient occupées qu’à 5% au plus fort de la crise ».

Jacques Deroo, président du collectif Salauds de pauvres, explique que « ce sont des personnes qui ont passé un nombre incalculable d’années dans la rue, on ne peut pas les reloger comme ça. Ce sont des personnes très déstabilisées qu’il faut prendre en charge. Beaucoup ne veulent pas retourner en centre d’hébergement », ajoute-t-il, rejoignant ainsi le point de vue d’Arno Klarsfeld, dans son rapport remis à Nicolas Sarkozy. L’avocat parisien, nommé médiateur par le ministre de l’Intérieur en décembre dernier pour résoudre la crise des tentes du canal Saint-Martin, préconise « l’ouverture de centres à taille humaine, de 30 à 50 places », qui tiennent mieux compte de la très grande diversité et des véritables difficultés des sans-abri. Il y énumère les raisons du refus des sans-abri de se rendre dans les centres d’hébergement actuellement existant : la promiscuité, le mauvais sommeil ou le réveil à heure fixe.

Une idée reprise par Jacques Deroo, qui monte à Ivry une structure communautaire mieux adaptée aux sans-abri. « Le gouvernement voudrait résoudre le problème tout de suite et il ne peut pas. Je travaille dans l’urgence, et ces personnes sont dans l’attente ». Il demande surtout à l’État des moyens. « La situation est très complexe. L’État peut donner les moyens, mais ne peut pas faire le travail à la place des travailleurs sociaux. Même avec les moyens, cela ne veut pas dire que l’on va tout résoudre ».

mercredi 7 mars 2007

François Bayrou se dévoile aux internautes

Trois couleurs : bleu, orange et blanc. C’est ainsi que se décline le blog de Bayrou. Du bleu pour les titres, de l’orange pour la colonne interactive à droite de la page, le tout sur fond blanc. La couleur, qui est celle du blog officiel de l’UDF, se veut celle de la révolution orange, à l’instar de la révolution orange qui avait accompagné l’élection du président ukrainien l’année dernière.
Le site se veut surtout interactif : du texte, de la vidéo, et de nombreux commentaires de partisans qui expliquent leur choix de voter Bayrou. Du dernier reportage du candidat centriste à Toulouse auprès des salariés d’Airbus, sa position sur la dette en France ou le modèle d’exploitation familiale français, les positions officielles du candidat centriste sont bien sûr présentes sur ce site. Plus insolite, c’est aussi le candidat dans son intimité que l’on découvre. « François Bayrou sous le signe de l’amour », long article qui a suivi la diffusion de son portrait dans l’émission d’Envoyé spécial où l’on découvre un Bayrou dans ses relations familiales et professionnelles ; des vidéos où il parle de ses auteurs préférés et des personnalités qui l’ont marqué tout au long de son parcours politique, ce blog est entièrement destiné à nous faire mieux connaître qui est François Bayrou. Une sélection des meilleurs clichés du candidat - sur un bateau de pêche, à la montagne ou lors d’un meeting, est aussi visible sur son blog.
Autre innovation, certaines de ces vidéos sont doublés pour les malentendants. Il pense à tout le candidat Bayrou. Et parce qu’un vrai supporter ne saurait partir en campagne sans son kit complet d’affichage, on peut aussi y télécharger des tracts et autres affiches au slogan du président de l’UDF. Et placer les liens de ces vidéos sur son propre site. Toute la panoplie du vrai supporter du candidat centriste.
Enfin, pour ne pas perdre le contact, on peut suivre tous les déplacements du candidat, grâce à l’agenda proposé en fin de page, ainsi qu’une revue de presse des apparitions et interviews de François Bayrou dans les médias. Et ça marche. De nombreux commentaires, souvent élogieux mais surtout passionnés, accompagnent chacun des articles. On y trouve même une revue de commentaires.
http://www.bayrou.fr/ le blog du candidat centriste à ses fans.

vendredi 23 février 2007

Les Frigos, chambres froides de la création

Ilots culturels au milieu de grues et de bâtiments en verre, les Frigos sont un havre de paix artistique au cœur d’un quartier en plein travaux. Une sorte de no man’s land de la créativité. Dans le nouveau quartier de Paris rive gauche qui sort lentement de terre, les quelques 200 artistes qui ont élus résidence aux Frigos entendent bien résister pour garder leur outil de travail.

On entre aux Frigos par l’escalier B. Un escalier en colimaçon, tout en ciment. Dans la tour qui de l’extérieur ressemble à un château d’eau. Les murs sont gravés de tags, de toutes les couleurs. Du bleu, du rouge, du noir, du jaune, du vert. Les couleurs s’enchevêtrent pour ne former par endroit qu’un gribouillis illisible. Les murs de certains étages sont aussi recouverts de graphs. D’autres le sont de tracts. Ici, c’est une affiche de théâtre pour une pièce d’Edward Bond. Là, c’est une bande dessinée du super-héros Spiderman. Plus loin, un autre tract appelle à lutter contre la faim en Afrique. Au cinquième étage, les murs sont restés gris, de la couleur du béton. Encore vierges du pinceau de l’artiste inspiré.

Derrière les lourdes portes massives se cachent d’anciennes chambres frigorifiques. Ces chambres qui désormais fourmillent d’activités artistiques et créatrices. Après la Première Guerre mondiale, la compagnie ferroviaire de Paris-Orléans entreprend la construction des Frigos afin d’approvisionner les Halles en produits frais. A la fin des années 1960, les Halles partent s’installer à Rungis, les Frigos sont laissés à l’abandon. En 1980, des artistes investissent les lieux, après que la SNCF, propriétaire des locaux, autorise la location d’un premier lot de surfaces.

Aujourd’hui, environ 200 artistes ont leur atelier aux Frigos. Parmi eux, quelques artistes célèbres, tels l’architecte Paolo Calia, qui fut décorateur sur les films de Fellini. On y trouve des ateliers de couture, de théâtre, de peinture, de sculpture, des studios d’enregistrement et même un cabinet d’architecture.

Sacha est artiste peintre et décorateur. Son atelier se trouve au quatrième étage, l’avant-dernière pièce au bout du couloir. Aux sons de la musique latino qui s’échappent de son poste de radio, il mélange la couleur pour sa nouvelle toile. « Je suis ravi de toute cette évolution. Le quartier devient magnifique. J’aime bien l’idée qu’il y ait des bureaux, ils amènent des magasins, des restaurants, des pharmacies. Ils appellent la vie. Ce qui m’emmerderait, c’est qu’on nous vire. Là, ce serait détruire ».

Car les artistes craignent pour l’avenir des Frigos. Sur la façade ouest de l’immeuble, une grande banderole est affichée. « Sur le terrain mitoyen, encore des bureaux. Concertation tronquée, gâchis économique. Où va la ville ? ». Elle est signée de l’APLD 91, association pour le développement du 91 quai de la gare dans l'est parisien. Cette association organise chaque année des portes ouvertes pour faire découvrir les Frigos et le travail des artistes. Elle rappelle que les Frigos ont échappé à la destruction grâce à la mobilisation des artistes, l’association des locataires et le soutien des autres habitants historiques du quartier.

« Nous menons un combat depuis dix ans. Nous ne voulons pas de bâtiment à quelques mètres de nos fenêtres, nous n’aurions plus la lumière du jour. Nous aurions aimé qu’il y ait moins de bureaux. Les façades des immeubles sont toutes vertes, grises ou noires. C’est moche, surtout les jours de pluie. On défend notre outil de travail. On aimerait bien ne pas être étouffé par tous ces bureaux ». Marianne Nicotra, artiste indépendante, donne des cours de couture à une dizaine de femmes venues de Paris et de banlieue. Elle est installée aux Frigos depuis 1981.

Stéphanie Bainville, elle, est plus inquiète. Elle occupe la pièce attenante à celle de Marianne. Trois jours par semaine, elle donne des cours de théâtre à des enseignants, venus travailler sur la transmission. Elle leur dispense des exercices sur la voix ou le corps. « Ça devient moderne, mais je suis très inquiète par ce qu’il va se passer ici. Je pense qu’ils vont faire sauter les Frigos », lâche-t-elle dans un soupir.

Car de l’extérieur, le contraste est bien réel. Les Frigos, qui ont gardé leur forme d’origine, ressemblent à cette friche industrielle dénoncée par les promoteurs immobiliers, avides de le détruire pour y construire un nouvel immeuble. Les artistes aiment ce lieu qu’ils ont rénové, repeint, dont ils ont percé les murs et aménagé les cloisons. Ils aimeraient qu’il soit réhabilité, à l’image des Grands Moulins tout proches. « Regardez ce qu’ils ont fait aux Grands Moulins. C’est magnifique. Mais c’est un monument classé », s’exclame Sacha.

En attendant de connaître leur sort, les artistes continuent à créer, et entendent bien profiter de ces nouveaux aménagements. « Je suis très contente. Les conditions se sont améliorées. Il y a plus de moyens de transport, une pharmacie et un Monoprix. Il manque un peu de couleurs à tous ces immeubles » conclut Marianne.

Le renouveau du franc

Depuis cinq ans, le 17 février, une centaine de personnes défile aux flambeaux à Paris pour réclamer le retour du franc. Au chant de la Marseillaise et à grands renforts de drapeaux français, nationalistes et souverainistes réclament l’indépendance de la France et la sortie de la zone euro.

« Ridicule. Bouh ». Du haut de sa fenêtre du 5e étage, un homme hue la procession qui défile en bas de la rue. Environ deux cents personnes, des flambeaux à la main, tiennent des drapeaux français et deux grandes banderoles « euro, monnaie d’escrocs ». Ils défilent pour demander le retour du franc.

Ils sont partis du Bon Marché. Ils empruntent le boulevard Raspail, la rue de Sèvres, continuent par la rue du Four, la rue de Buci, et enfin s’engagent dans la rue de Seine, avant d’arriver à l’Institut de France, dernière étape de leur parcours. Ils arpentent les rues de la capitale, sous escorte policière, qui n’hésite pas à bloquer la circulation du boulevard Saint-Germain pour les laisser passer. En tête du cortège, la semeuse, ornée de l’inscription « République française », ouvre la marche. Deux hommes portent un brancard avec une reproduction d’une pièce de un franc. Au milieu, beaucoup de jeunes d’une vingtaine d’années, de personnes d’un certain âge, une ou deux poussettes.

Les manifestants entonnent la Marseillaise à plusieurs reprises, entre deux exhortations pour le retour au franc. Une manifestation nationaliste, ce qu’assume le renouveau français, l’une des associations organisatrices. « Souverainiste », rectifie Dominique Mahé, qui roule une affiche pour le candidat souverainiste Nicolas Dupont-Aignan. « Je ne suis pas fondamentalement pour un retour du franc, sauf si la situation économique s’aggravait. Mais je constate que le pouvoir d’achat a diminué de 30 % depuis l’introduction de la monnaie européenne. Je tiens une petite entreprise de papeterie, et je le vois tous les jours auprès de mes clients. D’un point de vue technique, la mise en place de l’euro a coûté cher. Les magasins ont dû faire un double affichage, il a fallu remplacer toutes les caisses enregistreuses ».

Dans les rues branchées du quartier Saint-Germain ce samedi soir, cette marche a quelque chose d’anachronique. Un décalage entre un quartier « bobo et gauchiste » selon Dominique, et cette manifestation aux flambeaux, à contre-courant, où le chant de la Marseillaise s’élève au milieu des slogans « le franc aux Français ». Il est 19h, et de nombreux clients sont attablés dans les cafés et restaurants de cette rue animée. Ils regardent le défilé. Beaucoup sont surpris. Quelques passants s’arrêtent et regardent. S’avancent pour prendre les tracts distribués par les organisateurs. Certains les insultent. Au bar La Palabre, à l’angle de la rue de Seine et de la rue de Buci, des personnes attablées entament une discussion avec les manifestants.

Xavier Grange milite au sein de l’alliance pour la résistance nationale, l’autre association organisatrice. « Je suis clairement anti-européen et hostile à la construction européenne. L’ensemble de la zone euro fonctionne très mal. Les pays n’ont pas de structures économiques proches. L’Angleterre, la France et l’Italie ont des économies trop divergentes pour faire partie d’une zone monétaire optimale. Il n’y a jamais eu autant de délocalisations depuis que l’euro est devenue la monnaie unique ».

Pour Benjamin, 19 ans, étudiant en BTS de comptabilité gestion à Bordeaux, sa présence à cette manifestation va bien au-delà de la simple question économique posée par l’euro. « Je suis pour le retour au franc et la suppression de l’euro, symbole qui réduit notre souveraineté nationale et la liberté de la France. Je suis contre l’impérialisme supra-national qu’est l’Europe. La monnaie, au même titre que la langue et la culture, fait partie de notre identité. Je rejette tout ce qui tend à réduire notre identité. Six lois sur dix sont d’origine européenne ».

En cinq ans, le nombre de manifestants a augmenté. « En 2002, nous étions 27. Quand je distribuais les tracts, je me faisais littéralement insulter. Nous étions dans le déni total. Depuis deux ans, il y a une évolution, les gens s’y intéressent. Ils sont surpris et notre démarche les interpelle », commente Xavier.

Le défilé atteint la place de l’Institut de France. La manifestation a été courte, à peine une demi-heure. Dès 18 heures, quelques personnes étaient rassemblées devant le Bon Marché. Des jeunes skin-heads sont venus s’affronter, devant la police. Les pompiers sont arrivés peu après. On les retrouvait dans la manifestation, crânes rasés et une écharpe cachant le bas de leur visage.

La Renault 19 bleue de la police file. Les huit porteurs de drapeaux et de banderoles montent sur les marches de l’Institut pour la photo finale. Sous les lumières de la nuit, devant les colonnes de l’Institut, l’image a quelque chose de théâtral. « Terminer sur l’esplanade de l’Institut donne une certaine allure. La manifestation aux flambeaux donne du cachet, on essaie de mettre un minimum de décorum avec notre peu de moyens », commente Xavier Grange. Après les discours appelant à la liberté de la France, ils entament une dernière Marseillaise, replient les drapeaux et se dispersent dans la nuit parisienne. Et se donnent rendez-vous pour le 17 février 2008.

Des planches à l’écrit

Jolie brune aux yeux bleus, Isabella Monnier-Leland a longtemps mis en avant son côté sérieux, grâce à un parcours scolaire réussi qui l’a mené jusqu’en master de journalisme à Paris 3. Sous son beau minois à la Audrey Hepburn, dont elle est une inconditionnelle, cette franco-américaine de 20 ans cache pourtant une véritable passion pour le cinéma.

Une passion qui lui a donné envie très jeune de faire du spectacle. Isabella a participé à des castings et même joué dans un court-métrage. Elle reconnaît pourtant qu’elle ne « se lance pas à fond », préférant privilégier les études. « C’est un milieu où il faut se débrouiller par soi-même, se faire remarquer, or pour l’instant, je ne fais pas ce qu’il faut pour ».

Consciente de la difficulté de percer dans le monde du cinéma, où « les gens sont pris plus sur leur physique que sur leur talent », et que le cinéma qu’elle aime « n’existe plus », Isabella a donc poursuivi ses études avec assiduité, « par goût et non par défaut » tient-elle à préciser. Et si elle ne peut être actrice, elle sera journaliste. « J’aimerai travailler dans un magazine féminin. C’est un milieu très ouvert, qui me résume bien car il allie à la fois de traiter de sujets sérieux, tels que la condition de la femme en Afrique, et d’articles sur la mode ou la cinéma ». Et qui lui permettrait de s’épanouir tout en restant dans le milieu artistique.

Ce qui ne l’empêche pas de cultiver sa passion tous les mercredis soirs, où elle file à sa répétition de théâtre dès la sortie des cours.

« Internet place les journalistes sous surveillance »

Pascal Froissart, chercheur associé au laboratoire communication et politique du CNRS, maître de conférences en sciences de l’information et de la communication à l’université Paris VIII - Vincennes Saint-Denis.

La SCI du couple Hollande-Royal a été divulguée sur un blog. Cela pose la question de la crédibilité d’Internet. Faut-il croire Internet ?

Internet est indissociable des autres médias. De même que l’on ne peut pas dire que la radio a moins de pouvoir que la télévision, Internet n’a pas moins de pouvoir que les autres médias. Il fait l’actualité au même titre que les autres médias. Nous sommes dans un monde où les médias sont interconnectés. Ce blog serait resté anonyme si un député n’avait pas repris cette information et ne l’avait pas instrumentalisée. Si un citoyen lambda publie un super scoop, s’il n’est pas repris par une autorité, ce scoop n’a aucun effet. S’il n’y avait pas une élection, ce genre d’information passerait à la trappe. Dans le dispositif légal, on ne publie pas le patrimoine des candidats. C’est indécent.

Est-ce que cette affaire ne décrédibilise pas les médias, qui se sont contentés de reprendre l’information sans la vérifier ?

Internet change les données, la pratique du journaliste mais ne décrédibilise pas les autres médias. Il place les journalistes sous surveillance. La diffusion en est simplement facilitée grâce à Internet.

Quel est le rôle d’Internet dans l’actualité ? N’a-t-il pas une influence croissante sur les autres médias ?

Internet n’a pas un rôle particulier dans l’histoire. D’autant plus que dans cette affaire, il n’y pas eu un gros travail de journaliste. Internet est un support à l’actualité. Réussir à passer cela comme une information, c’est magistral. Les journalistes n’ont pas vérifié qui est l’auteur du site. En-dehors de la campagne, cette information ne passerait pas. C’est « l’effet de réel » dont parle le sociologue Pierre Bourdieu. On est en train de créer une réalité qui n’a pas d’importance. Est-ce que Ségolène Royal ou Nicolas Sarkozy vont faire un bon président ? C’est ça la question. C’est tragique, les journalistes se croient tout puissants. Quant à son influence, je parlerai d’un système croisé : la presse surveille Internet et Internet surveille la presse. Sur Internet, on trouve beaucoup d’articles copyrightés de journaux.

Quelle est la légitimité de l’information délivrée sur Internet ?

Selon l’étude médiamétrie, les sites d’information les plus consultés sur Internet sont TF1, Le Monde, Le Figaro. On retrouve les médias traditionnels. Les gens vont s’informer sur Internet sur les mêmes sites que dans la vraie vie. Internet est extrêmement structuré, il est difficile d’échapper à l’emprise du Monde, du Figaro ou de TF1.

N’importe qui peut ouvrir un site sur Internet et se déclarer expert dans un domaine. Comment établit-on la légitimité de l’information sur Internet ?

On établit la vérité sur Internet grâce à des signes extérieurs : on affiche la source, l’affiliation (le logo du CNRS par exemple), on travaille la cohérence de l’écriture et la mise en page.

Internet est-il un contre-pouvoir ?

Non. Les dix premières audiences sur Internet sont neuf entreprises, dont huit sont cotées en bourse et six sont américaines.

[1] Société civile immobilière

C de la télé

Il est 17h30 ce mercredi 6 décembre. Devant les locaux de la station de radio Europe 1, avenue Montaigne à Paris, une vingtaine de personnes attendent. Le froid s’immisce peu à peu alors que le ciel s’obscurcit. Les lampadaires s’allument. Jérôme sort de l’immeuble et vient prendre les noms des personnes présentes, puis les fait entrer. Chacun laisse sa carte d’identité à l’accueil, se défait de son sac et de son manteau, puis entre dans le studio. Jérôme les place sur deux rangées en cercle, sur deux étages. L’émission commence dans dix minutes. Parmi le public, une grande majorité de cheveux blancs. Michel est un habitué, il assiste à l’émission une fois par semaine. Il explique comment l’émission va se dérouler, où sont les caméras, où il faut regarder. Il connaît tous les cadreurs, les a salué en entrant.

Le thème de l’émission du jour, C dans l’air, est : « Impôts locaux, l’explosion ». Elle est présentée par Yves Calvi, et diffusée en direct sur France 5. Les cameramen se mettent en place. Ils sont six : trois à une caméra fixe, disposés en triangle, et trois caméras à l’épaule. Ils se déplacent pendant toute l’émission pour mieux filmer les intervenants.

Le plateau s’éclaire d’une lumière presque aveuglante. Au centre, une table ovale en verre, de la forme d’un fer à cheval. Quatre sièges autour sur lesquels viennent prendre place les invités. La décoration représente des gratte-ciels sur un fond orange ou bleu. Au fond du plateau, quatre tours en verre, derrière lesquelles se tient l’un des caméramans.

« Vous voyez là, à droite, c’est Jacques Marseille, un professeur d’économie sociale à la Sorbonne » commente Michel. « J’ai deux de ces livres à la maison, il m’en a dédicacé un. Il est saignant, vous allez voir ».

« Attention, émission dans deux minutes ». Yves Calvi arrive sur le plateau. Il porte une chemise violette et un pull gris foncé sur les épaules. Il s’installe, dispose ses papiers, enlève son pull tandis que la maquilleuse lui farde le visage. « Trente secondes. Dix, neuf, huit… » Le générique est lancé, Yves Calvi annonce le sujet, lance son introduction et présente ses invités. Tour à tour, il donne la parole à l’un ou à l’autre, pose des questions, lance un reportage, reprend la parole, écrit quelques notes, se gratte la jambe. Il se soucie peu de la caméra et de son image. Il n’a pas de prompteur, lit ses notes ou improvise, regardant tout à tour la caméra en face de lui ou l’un des invités. Calme, il modère les intervenants, car le débat s’enflamme. Les spectateurs sont immobiles, n’osant pas faire un geste.

C’est le dernier quart d’heure, le moment des questions des téléspectateurs. Le générique est lancé. Yves Calvi conclut, annonce « au revoir et à demain pour un nouveau sujet ». « Alors, vous l’avez trouvé comment Jacques Marseille ? » demande Michel. Et en partant lance « A la semaine prochaine » à Jérôme.

Un mois de prison pour avoir giflé sa femme

« Dossier suivant, monsieur David H. » De carrure imposante, un homme en costume gris, à la démarche volontaire, s’avance à la barre. Ce mardi 28 novembre 2006, David H. comparaît devant la 23e chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Paris pour violences conjugales. Le 2 octobre, il a giflé sa femme, Véronique, alors qu’elle s’apprêtait à se rendre dans son salon de coiffure. Elle a déposé plainte au commissariat de police et a eu une interruption de travail de deux jours. David H. s’est vu l’interdiction de se rendre au domicile conjugal.

La présidente demande à David H. s’il reconnaît les faits. « Pas du tout », répond-il. La présidente insiste, lui présente le certificat médical de son épouse et évoque le climat de tension qui règne au sein du couple. « Madame, je fais 1,90 m, 137 kg. Si j’avais giflé ma femme, il lui aurait fallu plus de deux jours d’arrêt de travail. J’ai demandé le divorce il y a un an, alors je n’ai pas de raison d’être violent ». « Pourquoi avez-vous demandé le divorce ? » s’enquiert la présidente. « Parce que cette femme ne me convient pas, elle n’est pas celle que je croyais » lâche l’accusé.

La présidente lui rappelle qu’il a déjà été condamné en octobre 2005 à six mois de prison avec sursis et trois ans de mise à l’épreuve pour injures publiques. « Vous avez été placé en procédure de suivi judiciaire. Qu’en avez-vous retiré ? » « Que je n’aurais jamais dû prêter attention à cette femme. J’ai perdu mon temps avec elle ».

L’avocate de la partie civile se lève et tend une lettre manuscrite, écrite par David H. Elle la remet à la présidente, qui lit tout haut : « Je n’aime que toi ». « Vous avez une interdiction formelle de prendre contact avec elle et vous lui écrivez une lettre », s’étonne-t-elle. L’accusé se tait.

L’avocate de l’épouse, absente, prend la parole. Elle explique qu’il régnait un climat de tension psychologique au domicile du couple. Que si David H. a l’interdiction de se rendre au domicile de son épouse, il ne lui est pas interdit d’aller au salon de coiffure de celle-ci. Or David H. passe ses journées dans le bar en face du salon de coiffure. Sa cliente ne veut plus le voir.

C’est au tour du procureur. Il souligne le déni total de David H. devant les faits qui lui sont reprochés. « Vous avez eu un certain nombre de rapports d’incidents durant votre contrôle judiciaire. Jusqu’où cela peut-il aller ? » tonne-t-il.

Dans son verdict, le tribunal suit la peine requise par le procureur, et condamne David H. à quatre mois d’emprisonnement dont trois mois avec sursis, une mise à l’épreuve de dix-huit mois et une obligation de suivi social et psychologique. Et l’interdiction de fréquenter le domicile et le salon de coiffure de son épouse. David H. a fait appel.

Les joueurs d’échec du Luxembourg

L’homme est concentré. Il est âgé, ridé. On devine ses cheveux blancs sous sa casquette. Emmitouflé dans son manteau d’hiver, il n’a même pas pris la peine d’ôter sa sacoche. Il observe le jeu de son adversaire, ses doigts gantés bougent d’impatience et raclent la table. Sa main nerveuse vient déplacer la reine noire. En face, l’homme, beaucoup plus jeune, est immobile. Il porte des lunettes noires. Une boucle d’oreille en argent est accrochée à son lobe gauche. Il est habillé d’une veste et d’un pantalon noir. Un cartable est posé au pied de sa chaise. A son tour, il bouge une pièce du jeu.

Il est 16h30 ce jeudi dans le jardin du Luxembourg. L’heure de la sortie des écoles environnantes. Rien ne semble déconcentrer ces deux joueurs. Ni cet homme, debout, à côté de la table, une capuche vissée sur la tête, qui observe patiemment la partie qui se joue, sans dire un mot. Ni ces deux femmes, blondes, toutes de noirs vêtues, qui passent entre les tables, s’arrêtent, observent un instant, puis s’en vont en commentant la partie.

Tout autour, le sol est jonché de feuilles mortes, tombées des arbres d’à côté. Des mères de famille se promènent avec leurs bébés dans des poussettes ; d’autres enfants courent dans l’allée en se chahutant mutuellement. Un peu plus loin, on peut entendre le son des balles qui viennent frapper la raquette des joueurs du cour de tennis.

A la table voisine, la partie est plus animée. Deux joueurs se font face, tandis que deux spectateurs commentent chaque coup. L’odeur de leurs gitanes s’évapore lentement dans l’après-midi finissante. L’un porte un blouson bleu, a les tempes grisonnantes. Il est immobile, ne dit pas un mot, mais ne perd pas une miette de la partie qui se joue devant lui. L’autre est plus actif, observe, se retourne, va d’une table à une autre.

Mais déjà on entend les sifflets. Les gardiens arrivent, annoncent la fermeture du jardin. Les mamans se dépêchent de rentrer, les joueurs de ranger leurs pièces dans leur sac. Ils n’ont pas fini leur partie. Ils reviendront demain.

Vendeurs de bibelots

« Versailles, Versailles, Versailles ». Les portes du château se ferment, le flot de visiteurs se dirige vers la sortie. Une manne pour les vendeurs de bibelots, qui les hèlent en prononçant trois fois le nom de la ville du Roi soleil.

Deux femmes et un homme achètent une carte postale, puis s’éloignent. Un nouveau vendeur surgit, tout aussi insistant. Lui ne vend pas de cartes, mais des Tours Eiffel miniatures. Coiffé d’une casquette militaire, il porte un grand sac de voyage noir où il entasse sa marchandise. Il les accompagne, fait quelques pas avec eux. Ils s’arrêtent un instant, intéressés par ce qu’il a à vendre. Il dévoile alors les trésors cachés dans son sac : des montres, des médailles, des foulards. Les trois personnes repartent, s’arrêtent à nouveau. Il palabre, parlemente, tente de les convaincre d’acheter. Finalement, les touristes finissent par s’éloigner. Mais déjà, le vendeur a repéré d’autres cibles.

Ici, c’est un couple d’européens de l’est, là ce sont des touristes asiatiques. Trois achètent un foulard. La transaction est priée de se faire vite. Le vendeur se fait plus pressant, il jette des regards inquiets à droite et à gauche, redoutant l’arrivée des policiers à chaque instant.

Ce jeune couple ne fait pas trois mètres sans être accosté par un vendeur. Ils ne se comprennent pas, ne parlent pas la même langue, ne sont pas intéressés par sa camelote. Cette jeune fille aux longs cheveux roux, malgré ses « niet » fermes et répétés, accepte d’ouvrir la boîte rouge que lui tend le vendeur. Puis repart, faisant signe qu’elle n’en veut pas.

Les grilles et les fenêtres s’illuminent à mesure que le ciel s’assombrit. Le froid devient plus vif. On aperçoit la première étoile. Le parking se vide peu à peu, le dernier bus démarre. Le gardien vient fermer la grille, les vendeurs de bibelots se dispersent.

Laura, 24 ans, 15 ans de cinéma

Petite rousse aux yeux bleus, Laura Martel, 24 ans, semble être née pour jouer la comédie. Ou du moins pour occuper l’espace. Qui penserait que cette étudiante en journalisme à l’université de la Sorbonne nouvelle a déjà un passé d’actrice, avec deux films et dix-huit téléfilms à son actif ? Elle a tourné avec certains grands noms du cinéma français, comme Jean-Pierre Mocky, Josée Dayan, Claude Rich ou Gérard Klein pour le petit écran. Pourtant, fréquenter tant de célébrités ne lui a pas donné la grosse tête, elle s’en défend, même si elle avoue que l’on peut vite devenir une « petite conne ».

Laura Martel a eu six ans lors de son premier tournage. Et a enchaîné les films jusqu’à l’âge de 20 ans, avant de se tourner vers le théâtre. Tout en continuant brillamment ses études, puisqu’elle a suivi une prépa littéraire après le bac, a enchaîné avec une licence d’anglais et le master de sciences politiques de Paris spécialité journalisme, avant de se retrouver cette année sur les bancs de l’université de la Sorbonne nouvelle.

S’il fallait dater ses tout premiers débuts, Laura les fait remonter à sa plus petite enfance. « D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours fait des spectacles. Dès que j’ai su parler, j’apprenais des cassettes de contes, comme le petit chaperon rouge que je connaissais par cœur. Et je m’empressais de faire une représentation à toute la famille ». Une famille pourtant loin des projecteurs, puisque sa mère est psychothérapeute et son père opticien. Sa véritable carrière d’actrice en herbe commence à 5 ans. Alors qu’elle joue une représentation dans une maison de retraite, une dame lui dit que le réalisateur Jean-Pierre Mocky recherche une petite fille blonde aux yeux bleus pour son prochain film, Divine enfant. Premiers souvenirs : « C’était génial. J’ai fait de la barque, de la calèche, je jouais avec un bébé chien. J’étais chouchoutée, tout le monde s’occupait de moi ». « J’ai passé toute ma jeunesse à m’amuser » raconte-t-elle, enthousiaste.

Désormais elle préfère le théâtre au cinéma : « Le théâtre, c’est l’art de la prise de risque, de l’équilibrisme, du lâcher prise. C’est beaucoup plus brut, alors que le cinéma est beaucoup plus travaillé. On est face au public et quand il ne répond pas, on se sent très seul ». Cette « passion » occupe une place grandissante dans sa vie. Elle vient de terminer la représentation d’un boulevard, Meurtrières à quatre épingles et s’est lancée dans l’écriture d’une pièce. Une passion qu’elle estime pouvoir concilier avec son futur métier. « Être pigiste, c’est être chômeur intermittent, donc les deux emplois du temps sont compatibles ! », conclut-elle malicieusement.

Paroles de militant

Frédéric MATHIEU, 29 ans, marié, attaché d’administration centrale, est militant au parti socialiste depuis dix ans. Très impliqué lors de la primaire au sein du PS, puisqu’il a représenté le candidat Laurent Fabius dans sa section, à Dreux, il nous confie sa déception après le vote du 16 novembre et ses attentes pour la prochaine présidentielle.

Où étiez-vous le 16 novembre, jour de l’élection du candidat du parti socialiste pour la prochaine campagne présidentielle ?

J’étais dans ma section locale à Dreux pour voter et surveiller le vote.

Comment était l’ambiance ?

L’ambiance était bon enfant. Elle est devenue plus tendue après le dépouillement. Il n’y a pas eu d’affrontements, mais les enjeux qui ont fait la campagne ont resurgi, avec la satisfaction de ceux qui avaient raison et la déception des autres.

Quel a été le score dans votre section ?

Sur 63 inscrits, il y a eu 54 votes exprimés, dont un nul, 34 voix pour Ségolène Royal, 12 pour Dominique Strauss-Kahn et 8 pour Laurent Fabius. Le résultat a reflété les tendances nationales.

Lorsque vous avez appris le résultat, vous avez été déçu ?

Déçu et en colère.

Pourquoi ?

Disons que les candidats n’étaient pas interchangeables. Ce n’était pas un débat de personne, mais un vrai débat politique. Nous avons vraiment abordé des questions de fond. A travers la divergence de propositions des candidats, on voyait bien deux options se dessiner : une option socialiste et une option social-libérale. Avec l’élection de Ségolène Royal, c’est l’option social-libérale qui a été préférée.

J’ai orienté ma colère sur les nouveaux adhérents, car ce sont eux qui ont fait la bascule. Au 31 décembre 2005, le PS comptait 120 000 adhérents. Le jour du vote, nous étions 215 000 adhérents. Soit plus de 95 000 nouveaux adhérents à 20 euros. Majoritairement, ce marais[1] a adhéré pour Ségolène. J’étais en colère de voir des personnes qui n’avaient pas de vécu militant suivre bêtement les sondages. Quand on revient à la genèse de la candidature de Ségolène Royal, ce sont les médias qui ont désigné la candidate. Politiquement, cela pose un problème de voir un grand parti d’opposition qui est structuré par les sondages. Cela heurte profondément quand on voit ce décalage.

D’où vous vient cet engagement militant ?

Il y a eu plusieurs évènements déclencheurs. J’ai toujours été concerné par les enjeux politiques. Petit à petit, je me suis senti un citoyen engagé pour participer à la vie de la cité. En janvier 1996, Mitterrand est mort. Je fais partie de la génération Mitterrand. J’ai alors pris conscience d’un héritage, d’une page qui se tournait. C’était le moment d’adhérer. Je l’ai fait en novembre 1996, soit dix mois après la mort de Mitterrand, mais j’ai pris le temps d’y réfléchir.

Allez-vous voter pour Ségolène Royal le 22 avril prochain ?

Je m’interroge beaucoup. Officiellement, tout le monde a dit que la campagne serait faite pour le candidat. Mais quand je discute avec mes camarades, beaucoup me disent qu’ils ne vont pas faire la campagne, certains vont même quitter le PS. Personnellement, j’ai beaucoup d’interrogations sur mon action pendant la campagne. Je voudrais préciser un point : ce n’est vraiment pas une question de personne. C’est une question politique eu égard à sa méthode, aux propositions avancées. Nous sommes en train de vivre le même schéma que le New Labour en 1997 en Grande-Bretagne avec Tony Blair. On assiste à une droitisation du parti. Et aujourd’hui, je ne me sens pas prêt à assumer cela.

Alors pour qui voterez-vous à la présidentielle ?

Si la gauche anti-libérale arrive à proposer une candidature unique, je voterai pour ce candidat.

Et si Ségolène Royal est élue à la présidence, vous resterez au PS ?

Je ne sais pas. Mes interrogations portent là-dessus, sur ce qui se passe maintenant et une fois qu’elle sera élue. Je pourrais prendre une décision affective qui serait de prendre la porte. Mais cela fait dix ans que je suis au PS, je vais donc attendre un peu, je ne suis plus à quelques mois près.



[1] Ndr : marais désigne le corps électoral pour lequel on ne peut pas prévoir à l’avance ce qui va ressortir

Trois questions à Yann Pusztai

Brun aux yeux bleus, réservé, Yann Pusztai, 25 ans, joue de la guitare depuis l’âge de dix ans. Étudiant en master de journalisme à l’université Paris 3, il espère bien pouvoir vivre un jour de sa passion. Avec son quartet de jazz, il donnera un concert le 13 décembre prochain à Paris. Il nous parle pudiquement de sa passion, la guitare et le jazz en général.

Comment êtes-vous venu à la guitare, et au jazz en particulier ?

J’ai commencé le piano car la musique me branchait, mais j’ai vite trouvé cela rébarbatif. J’avais un oncle qui était guitariste de jazz , alors je me suis mis à la guitare. J’ai toujours écouté du jazz, grâce à cet oncle notamment. Et quand on apprend la guitare, le jazz, c’est un peu la base. C’est le style le plus poussé, à tous les niveaux, que ce soit sur le plan harmonique ou théorique. Après le bac, j’ai étudié dans une école de musique, l’école ATLA, à Paris, dans le 18e arrondissement. Plus j’apprenais, plus j’adorais ça.

Selon vous, que faudrait-il faire pour rendre le jazz plus accessible ?

Il faut être soit un mélomane fou pour l’écouter, soit l’avoir appris pour le comprendre. Le jazz ne peut pas accrocher les gens comme d’autres styles de musique. C’est un milieu assez élitiste, et ce n’est pas quelque chose qui rapporte beaucoup. Il n’y a pas de solution miracle pour faire aimer le jazz. Si on diffusait une heure de jazz tous les jours à la radio, ça pourrait lasser. Je pense par exemple que le public qui écoute une émission comme « Ascenseur pour le jazz » sur France Inter est un public averti.

Où vous voyez-vous dans dix ans ?

C’est juste un souhait, mais j’espère être à New-York et vivre du jazz, d’une manière ou d’une autre. J’y ai passé un an l’an dernier, et j’ai pris des cours avec Mike Stern, un musicien qui a changé ma vie.

The triumphant sight

It is a neglected monument by the French, but it offers one of the most beautiful outlook of Paris. For the Parisians, it is above all famous as one of the most dangerous places to drive, and certainly the most dangerous crossroad of France.

With a 50-meter height, the equivalent of the Eiffel Tower’s first floor, the Arc de Triomphe presents a unique perspective, as it is in the perfect line that goes from the Grande Arche de la Défense to the Concorde obelisk to the Pyramide du Louvre.

The Arc de Triomphe is the most popular national monument visited in France, according to Pascal Monnet, the civil servant who is in charge of it at the Monuments Nationaux Agency. This is a public institution that rules around one hundred monuments in France, including the Pantheon, the Holy Chapel in Paris or the Mont-Saint-Michel in Normandy and many castles in southern France. The Arc de triomphe received 1,200 million visitors in 2006. In the top ten of the most visited monuments in Paris, it arrives at the tenth position[1]. Which is quite honest, as it is rather expensive (8 euros) and there is nothing to see except the view. By night, the Arc is open until 10.30 pm in winter and 11 pm in summer, when visitors are more numerous, as 300,000 people per day wander on the Champs-Elysées, a majority during the evening. The view of Paris from the Arc de Triomphe by night is always worth a visit.

“85 % of visitors are foreigners. Many French even do not know that they can visit the Arc de Triomphe. It is more acknowledged for its traffic-jams. We have more and more tourists who come from Brazil, China, India and Russia. They come here for the outlook, not for military or historical tourism.”, declares Pascal Monnet This is what Robert and his wife Julia come for. Both Americans, they are in Paris for ten days, and the visit of the Arc de Triomphe is recommended in their guide. “Look, it is just wonderful. The Grande Arche de la Défense on one side, the Louvre in the other. And all those cars underneath, they look like so tiny. That’s fun!”

But the Arc de Triomphe was historically a monument dedicated to the Revolution and Empire wars. In 1806, Napoleon ordered to erect an Arc de Triomphe to be built on the “Place de l’Étoile”. In 1814, after the defeat of the napoleonian army and a new political system, the construction stopped. The work started again in 1823 and the monument was finally inaugurated in 1836. It walls are covered with the names of 128 battles and 660 army generals.

“Today, it is a place for memory, patriotic and hommage” says Pascal Monnet. Underneath stands the grave of the unknown soldier. He was buried in 1921 and the grave pays tribute to all the anonymous soldiers died for the country in the first world war. Since the 11th of November 1923, the memory flame is relighted everyday at 18.30. It has never been put out since. The place is so sacred that it is guarded by two policemen twenty-four hours a day. And every year, on the 11th of November and the 8th of May, a national ceremony is celebrated attended by the President of the Republic and government members.

Hell for the Parisian driver, the Arc de Triomphe makes the happiness of the tourist.



[1] The first five are: the Cathedral Notre-Dame, Disneyland Paris Resort, the Sacré-Coeur de Montmartre, Louvre museum and the Eiffel Tower

A new shop for a new concept

Vincent Legros, who is 41 years old, opened a new shop in September in Versailles. The name of his shop is “Actéco”, for acting for ecology. The new shop’s concept is environmentally friendly and economical: Vincent is recycling ink cartridges for printers.

The customer carries the empty ink cartridges to the shop to be refilled. Vincent can recharge them in a couple of minutes, which allows the customer the option of waiting in the shop for a very short period or the customer can drop the cartridge off, and pick them up later. The refilling process costs half the price of a new cartridge. But Vincent prefers to keep the process secret. He admits that he can recharge 95 % of the brands of printers.

His shop is nearly profitable, he hopes it will be by the end of the year 2006. Since he opened, three months ago, he has currently 80 firms as customers, and more than 370 loyal clients. Most of them come because it is less expensive, offers for environmental concerns. “I have some customers who kept their empty cartridges, they did not want to throw them in the garbage” Vincent stated.

Before Vincent started his own business, he was a key account manager in British Petroleum (BP), the major oil company. His experience at BP is very useful for his new job. “I wanted to change my job and to become my own boss. I was looking for something new. And I feel concerned by environmental issues” he said.

When he heard about an environmentally friendly store, he decided to launch one himself. He thought about his project in great details and wrote down a business plan. After planning, he had to find a suitable office. Then he started on his ability to finance this project. It took him one year to realise his project. On the 31st of July, he left his job, and began to pay the rent on his own store on the 15th of August. He hired painters to beautify the outside of the building and an interior decorator for the inside. He opened his shop on the 19th of September. He funded it with his own, at a cost of 90,000 euros. “I sent out more than 40,000 leaflets, put some advertissements in free newspapers, and sent e-mails to customers, especially firms, applying what I did when I worked for BP”.

The concept comes from Australia, and it is well developped in the United States, in the United Kingdom, in Germany and in Italy. But it is quite new in France. “France is one of the last countries to develop it. In the United Kingdom, there are 200 stores, whereas in France, there are only 80. The market is in full expansion”.

Vincent works six days a week, from 9:00 am to 6:30 pm. He has a part-time employee. If the business continues to improve, his employee will become a full-time employee.

As a sign of his potential and success, he already has a new project: opening a shop in the town of Le Chesnay, closed to Versailles, next to the famous store “Fnac”. He is a happy shopkeeper who promotes environmental awareness while simultaneously providing a much needed service to the customer.

Antoine, the anti super hero

Antoine Pietri wants to be a journalist because of Superman. Even through, this 23-years-old man does not dream about being a marvellous hero. “It is not really well viewed to be a marvellous hero”. He is even quite humble.

And yet he had already a lot of experience. In his weekly city newspaper first, Toutes les Nouvelles, where he has been writing as a freelancer for two years. Then to the French national weekly newsmagazine Marianne, in May 2005. A “cool” experience according to him. “Every Wednesday evening, the editing team shared a meal to celebrate the end of the locking up of the current issue. It was a very open-minded team, very free. The people were doing what they said”, he says.

From January to May 2006, he worked at the Smithsonian Magazine, in Washinton D.C., as part of his studies. His work was to correct all the mistakes, both grammatical, and those based on the facts. A very interesting experience. To such a point that he says he would like to work there. “I just would like to find a job. And I do not have the ambition to be a reporter in the newspaper Le Monde. I am not so interested in hard news. I prefer to have hindsight, to have time to check on the news”.

And to play music, his passion. He plays guitar and bass in a music group every Tuesday evening. As a surprise, one of his preferred music band is the ‘Angle-Grinder Man’, a superhero for our times as it has been defined by the New York Times.

Un père Noël inattendu

Elle n’y croit plus depuis longtemps au Père Noël, Éliane. Et pourtant, ce 24 décembre, c’est bien le Père Noël qui frappe à sa porte. Un Père Noël sous les traits de Frédérique, qui a répondu à l’appel des petits frères des Pauvres pour porter un colis aux personnes seules en ce jour de Noël.

Éliane fait entrer Frédérique dans son deux pièces situé au troisième étage d’un immeuble du quartier Montmartre à Paris. Dans la pièce, une planche sur deux tréteaux de bois. Dessus, de petits objets réalisés grâce à une pâte spéciale et peints à la main. Ils ressemblent à des galets. Sur les murs blancs de son appartement sont affichés quelques dessins d’enfants qu’elles gardent. Une évocation dont elle parle avec joie et sourire.

Éliane ne correspond pas tout à fait aux personnes auprès desquelles interviennent les petits frères des Pauvres. Elle est plus jeune, a une quarantaine d’années, de longs cheveux châtains clairs, des yeux noisette. Elle se met à raconter quelques bribes de sa vie, pudiquement. Elle est peintre, a suivi des études aux Beaux-Arts, puis a vécu de sa peinture et d’enseignement. Elle vendait ses tableaux. Aujourd’hui, sa situation est difficile, mais elle essaie de s’en sortir. En situation de surendettement, elle n’a pas de travail, et est menacée d’expulsion dès la fin de la trêve hivernale.

Mais Éliane ne comprend pas, elle ne connaît pas les petits frères des Pauvres. L’été dernier, elle a fait appel au Secours catholique qui lui a apporté une aide alimentaire quotidienne. Elle a aussi fait appel au service social de la ville. Mais jamais au petit frère des Pauvres.

Éliane ouvre alors le colis et découvre un vrai repas de Noël : un bloc de foie gras, un flan de courgettes aux herbes fraîches, une boîte contenant du boudin blanc au porto, une demi-bouteille de vin, une demi-bouteille de champagne, des chocolats, une bûche, du pain, et une jonquille. « C’est une bonne surprise, je ne m’y attendais pas », déclare Éliane. « Je vous remercie beaucoup ».

En arrivant dans son appartement, elle ne savait pas quoi faire, alors elle a eu l’idée de créer ces objets, faisant appel à ses talents de peintre. Il ne sont pas finis, il lui manque du matériel, notamment pour en faire des broches. Des bagues, aussi, qu’elle espère bien pouvoir vendre. Sur des marchés de Noël par exemple. Elle y a pensé, mais l’emplacement est encore trop cher pour elle. Elle espère pouvoir y arriver l’an prochain. Et que sa situation se sera améliorée d’ici là. En attendant, elle se débat dans ses tracas quotidiens. Mais garde confiance. « Tant qu’on vit, il y a toujours de l’espoir », lâche-t-elle dans un sourire.

Éliane offre une de ses créations à Frédérique. La magie de Noël opère. Redonne espoir et joie à Éliane. Pour lui dire que des personnes pensent à elle.

« Travailler à la Tribune, c’est mon rêve »

Olivier Le Floch, 28 ans, a obtenu l’an dernier son diplôme de master en journalisme à l’université Sorbonne nouvelle à Paris. Depuis, il est pigiste au service culture de la Tribune. Un parcours fait d’opportunités qu’il a su saisir et d’une personnalité qu’il s’est forgée pour réussir dans cette voie.

Petit, mince et volontaire, Olivier Le Floch parle humblement de son parcours qui l’a amené au journalisme. Après des études scientifiques, un concours réussi à l’institut de formation des maîtres (IUFM) et un an passé dans cette école pour apprendre à enseigner, Olivier s’oriente vers la communication, où il suit les cours de l’école Sciences com’ à Nantes pendant deux ans. Il enchaîne ensuite les expériences dans la communication, à la direction générale de l’Office général des forêts à Paris, puis au centre international d’art contemporain à Montréal au Canada. Outre-Atlantique, il est attaché de presse lors de la 4e biennale d’art contemporain de Montréal, discipline qu’il affectionne particulièrement.

Rentré à Paris, il devient chargé de mission à la mairie du 3e arrondissement pour s’occuper de la communication de la première édition du Beau Bourg de l’Image, festival d’art visuel. Il travaille aussi pour le festival de cinéma en plein air, Soirs d’été. L’an dernier, il suit les cours du master de journalisme bilingue anglais-français à l’université de la Sorbonne nouvelle à Paris. Un master qui va lui ouvrir les portes du journalisme, et notamment de la Tribune. « J’ai passé une semaine à la Tribune lors d’un stage, pour remplacer l’un des journalistes du service culturel parti en vacances ». Ses vacances se prolongent, et Olivier reste finalement cinq semaines à la rédaction du quotidien économique. « La différence avec les autres stagiaires, je l’ai faite grâce à mon background culturel. J’avais travaillé auparavant dans l’art contemporain. Je vais au théâtre, je suis abonné à l’Opéra de Paris, je m’y connaissais donc dans le domaine culturel ». C’est ce background qui lui permet aujourd’hui de réaliser un rêve. « A la Tribune, je fais beaucoup de critiques cinéma, de théâtre, je couvre pas mal d’expositions ou de spectacles de danse. Je travaille dans un secteur rêvé, et j’ai une liberté totale. J’ai toujours retrouvé mes articles publiés tels que je les avais écrit ».

Même s’il n’est que pigiste, ce statut ne le dérange pas outre mesure, malgré la précarité qui y est associée. « Pour entrer dans une rédaction, on commence comme pigiste. Personnellement, j’aimerais bien rester pigiste. Cela apporte de la flexibilité, j’organise mes journées comme je veux, et je peux travailler pour plusieurs revues. ».

Un aboutissement qu’il doit aussi à ses multiples expériences, tant dans le monde du travail qu’à l’université. « Les journalistes sont très suspicieux sur ce que l’on a fait avant, sur notre background. Ce master prépare bien à la réalité du métier de journaliste ».

Bien que pigiste, et même s’il reconnaît que d’autres camarades de sa promotion ont toujours du mal à vendre leurs articles, Olivier considère son parcours comme réussi. Et donne la clé de cette réussite : « C’est bien d’être spécialisé dans un domaine. Il faut faire valoir que ses centres d’intérêts comptent dans sa volonté d’être journaliste ».

« La prochaine fois, ce sera la prison »

« Dossier n°10, Madame Dina L. », appelle la greffière.

Madame Dina L. avance, aux côtés de son avocat, un grand homme rond, au crâne dégarni. Il semble bien imposant à côté de cette femme frêle et élégante. Tout de noir vêtue, elle porte un joli chemisier blanc à jabot, des bottes, une jupe et un long manteau noirs. Le 6 octobre 2006, elle a été arrêtée au volant de sa voiture alors qu’elle était sous l’emprise d’alcool, avec un taux de 0.98 mg par litre d’alcool dans le sang. C’est un voiturier, sur les pieds desquels elle a roulé, qui a prévenu la police.

Nous sommes le mardi 28 novembre, madame Dina L. est le deuxième cas jugé ce matin-là dans la 23e chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Paris.

Elle reconnaît bien avoir bu quelques verres de rosé. Deux coupes de champagne aussi. Mais elle pouvait rentrer chez elle, « il n’y avait pas de danger », déclare-t-elle à la barre. Et puis elle n’était pas loin de son domicile. Elle ne semble pas réaliser. La présidente tente la pédagogie : « Alors, pourquoi il est interdit de rouler avec 0.98 mg par litre ? ». « Mais je n’avais pas le choix », répète-t-elle.

La présidente : « Si on résume, qu’est-ce que vous pensez de votre comportement ? » Silence de l’accusé. La présidente : « C’est très grave, et vous ne semblez pas mesurer la gravité de votre acte ». « Je roulais à 30 km/h, je n’avais pas le choix. Je n’ai jamais eu d’excès de vitesse en 25 ans ». « C’est pour conduite sous emprise de l’alcool que vous êtes ici, pas pour excès de vitesse », rétorque la présidente.

Elle lui rappelle qu’elle est en situation de récidive : en janvier 2003, elle a été condamnée pour des faits identiques par le tribunal correctionnel de Paris. Elle avait écopé de dix mois de prison avec sursis et une amende. « Avez-vous le droit de nous mettre en danger ? », demande la présidente. Puis se fait menaçante : « si nous avons la chance de vous avoir une troisième fois parmi nous, ce sera la prison, si ce n’est pas la morgue ou l’hôpital. Ce ne sont pas des menaces en l’air ».

La parole est au procureur. Lui aussi fait de la pédagogie, car l’accusée semble bien fragile : « La prochaine fois, madame, et compte tenu de votre passé, vous risquez de toucher le fond. Réagissez, sinon vous risquez la mise à l’écart, et l’enfermement entre quatre murs ».

Le tribunal a déclaré Me Dina L. coupable des faits qui lui sont reprochés. Elle est condamnée à cinq mois de prison avec sursis, une mise à l’épreuve de deux ans, une obligation de soins, et à l’annulation de son permis de conduire pour un délai de dix mois.

L’OL marque dès son entrée en Bourse

« Une première pour un club français ». C’est ainsi que Le Monde qualifie l’entrée en Bourse de l’Olympique lyonnais le vendredi 9 février. La cotation « avait même commencé sur les chapeaux de roues, enregistrant dès l’ouverture une progression de 6,25 %, à 25.50 euros, soit un cours supérieur à son prix d’introduction de 24 euros », commente le Figaro. Ce quotidien a choisi de traiter l’information dans sa rubrique boursière et non dans la rubrique sportive. Une introduction « célébrée en grandes pompes à la bourse de Lyon » précise-t-il.

Un démarrage « en trombe » selon l’Express qui s’explique par OL Land, la holding du groupe OL, « le projet pharaonique du président » de l’Olympique lyonnais, Jean-Michel Aulas. La holding OL Group rassemble le club de football, ainsi que plusieurs filiales dont « une agence de voyage, une agence d’évènementiel, deux restaurants, une brasserie, un salon de coiffure, plusieurs boutiques, une régie de publicité, un magazine et une chaîne de télévision, et de nombreuses franchises » précise La Croix. Le groupe emploie 200 personnes, et a dégagé un bénéfice de près de 15,9 millions d’euros en 2006.

Cette diversification du groupe, qui ne se contente donc pas de son club de football, semble nécessaire, car sur « le long terme, le foot n’apparaît pas comme une activité rentable pour l’actionnaire. Pour l’instant, les clubs cotés n’ont pas marché », analyse Marc Fiorentino, patron d’Euroland Finance à qui Libération a choisi de donner la parole pour commenter l’évènement.

Une entrée en bourse qui va, selon La Croix, « servir à financer le futur stade de l’équipe, dont le coût devrait se situer entre 250 et 300 millions d’euros ». L’offre du cours de l’action est en effet ouverte pour un montant de 85 à 100 millions d’euros, soit 30 % du capital d’OL Groupe, a annoncé Jean-Michel Aulas à l’agence France Presse.

Dans le concert de louanges qui a salué cette entrée en Bourse suivie par une hausse de 2 % à la clôture du titre, seul Michel Platini, le nouveau président de l’UEFA, l’instance européenne du football, a osé émettre une critique. Comme le rapporte Le Monde, Michel Platini a déclaré que l’on jouait pour « un aspect sportif. On va voir la cote baisser et monter en fonction des buts qu’on va prendre ».

Des élections déterminantes pour l’avenir des Balkans

Les journaux et hebdomadaires nationaux ont rendu compte lundi 22 janvier des résultats des élections législatives en Serbie, qui ont été remportées par le parti national serbe (SRS) dont le dirigeant est actuellement détenu au Tribunal pénal international de La Haye.

Le Nouvel Observateur, l’Express et Le Monde relatent la victoire des « ultranationalistes » en qualifiant ces résultats de « revers pour les Occidentaux qui espéraient que le scrutin permettrait à la Serbie d’opter pour un ancrage européen ». La Croix se demande d’ailleurs si ces élections ne sont pas « une élection pour rien » au lendemain de l’annonce des résultats. Mais le journal se veut optimiste, en soulignant, comme Libération, que « les deux principaux partis prodémocratiques ont néanmoins obtenu suffisamment de sièges pour pouvoir former un gouvernement de coalition s’ils parviennent à s’entendre ». Une majorité proeuropéenne que Le Monde juge « virtuelle », au regard des nombreux sujets de divergence entre ces partis : « l’intégration européenne, l’avenir du Kosovo et le rythme des réformes économiques ».

Ce sont justement sur ces enjeux que reviennent Libération et Le Figaro. Libération parle en effet du « défi » qui attend désormais le SRS, dans un pays où « le taux de chômage approche 30 % et que le pays compte un retraité pour deux actifs ». Quant au Figaro, qui a qualifié ces élections de « cruciales pour l’avenir », il revient sur les deux dossiers sensibles de la Serbie, « un pays imprégné de nationalisme » : la livraison du général Ratko Mladic au Tribunal pénal international de La Haye, condition de la réouverture des négociations de la Serbie avec l’Union européenne, et le statut du Kosovo, cette province majoritairement et ethniquement albanaise considérée comme berceau historique de la civilisation serbe par les nationalistes serbes. Il rappelle que le représentant spécial de l’ONU dans la région, l’ancien président finlandais Martti Ahtisaari, doit remettre son rapport au Conseil de sécurité de l’ONU sur une résolution du statut final de la province le vendredi 26 janvier. Et conclut que, entre la remise de ce rapport et la constitution d’un nouveau gouvernement en Serbie, « le mois de février risque d’être diplomatiquement chaud dans les Balkans ».

Le plan de renforcement américain en Irak très largement commenté

L’annonce du plan de renforcement des troupes américaines en Irak occupe une partie de l’actualité internationale des quotidiens et hebdomadaires nationaux ce jeudi 11 janvier 2007. Tous rendent ainsi compte, plus ou moins dans le détail, des mesures annoncées par le président américain lors d’une allocution télévisée au peuple américain le mercredi 10 janvier au soir.

Déjà, la veille, la plupart des journaux en donnaient le contenu attendu, dont de larges extraits avaient été diffusés par la présidence elle-même. Le Monde relate même qu’un compte à rebours avait été mis en place par les chaînes de télévision américaines avant le discours de George W. Bush, « comme pour mieux souligner la solennité de la décision du président américain ».

Tous les journaux soulignent que le président américain, « habituellement peu enclin à reconnaître ses erreurs » selon Libération, reconnaît la responsabilité de celles-ci, avant de détailler « la nouvelle voie en avant » (Libération) de ce huitième plan depuis le début de la guerre en Irak.

Le quotidien du soir développe longuement le sujet en relatant le cadre de la mise en scène de George Bush, qui était « debout, costume sombre, dans la bibliothèque de la Maison Blanche » et non dans le bureau ovale comme lors de ses précédents discours. « Il semblait moins assuré que d’habitude » ajoute le quotidien, « a buté plusieurs fois sur les mots et n’a pas terminé son discours par le rituel ‘‘Dieu vous bénisse’’, mais par un simple ‘‘merci et bonne nuit’’ ». Le même quotidien rappele la composition de la coalition militaire déployée en Irak, et consacre un article entier à l’opposition des démocrates à la nouvelle stratégie du président pour tenter de sortir du bourbier irakien. Il évoque ainsi l’hostilité des démocrates à « l’escalade », terme également employé par le Figaro et l’Express.

Le quotidien de droite insiste pour sa part beaucoup sur l’opposition suscitée par ces mesures. Se voulant plus critique et proposant plus une analyse qu’un simple compte-rendu de ces nouvelles décisions, il donne ainsi la parole au conseiller du premier ministre irakien, Sami al-Askari, pour qui renforcer le nombre de troupes américaines dans son pays « n’est pas la solution ». Le Figaro indique que ce plan irakien avait été accueilli « sous le feu des critiques » par les démocrates, dont l’un des sénateurs « a pris la tête de la révolte », considérant que leur victoire aux élections législatives de novembre valait « répudiation de la guerre en Irak ». Mais le Monde rappelle que « constitutionnellement, le Congrès ne peut pas s’opposer aux décisions du président » ; celui-ci « commandant en chef des armées, a le dernier mot en matière militaire » (l’Express).

Le Figaro rend aussi compte des réactions internationales que cette nouvelle stratégie a suscité. Il donne ainsi les points de vue des alliés américains, notamment ceux de la Grande-Bretagne, de l’Australie, de la France et de l’Allemagne, qui ont accueilli ces mesures « avec prudence ». L’Express évoque quant à lui les réactions inattendues de républicains hostiles aux mesures du président, dont « une dizaine de sénateurs pourraient rompre avec la politique irakienne du président ».

Enfin, Libération met en avant l’opposition des militaires américains à ce projet. Il souligne que « l’état-major américain n’a donné son assentiment [à ce nouveau plan] qu’en traînant des pieds » et rappelle que le général John Abizaid, ancien chef d’état-major, tout juste remplacé, « vient sans doute, pour cette raison, d’être limogé de son poste de commandant des opérations ».

La diplomatie s’invite là où on ne l’attend pas au sommet de l’Otan

Le sommet de l’Otan qui s’est tenu à Riga les 28 et 29 novembre a fait l’objet de plusieurs articles dans la presse française. Les journaux et hebdomadaires nationaux ont tous rendu compte, dans leur édition du 29 novembre, des conclusions de ce sommet, à savoir la priorité de l’Otan de contribuer à la paix et à la stabilité en Afghanistan. C’est d’ailleurs ainsi que titre Le nouvel Observateur l’article qu’il consacre à ce sujet, de même que Le Monde pour qui « l’Afghanistan s’impose à l’Otan comme une urgence ». Ce quotidien rappelle ainsi que les « 26 chefs d’État et de gouvernement de l’alliance atlantique ont conscience que l’avenir de leur organisation collective se joue en partie sur les contre forts de l’Hindou Kouch ». Ces mêmes chefs d’État y ont tous réaffirmé leur engagement militaire en Afghanistan, relèvent Le nouvel Observateur et Le Point.

Tous décrivent aussi la situation sur le terrain, qui ne cesse de se détériorer. Le Monde remarque ainsi que « l’Otan commence à perdre pied face à la guérilla des talibans et d’Al-Qaida », tandis que Libération parle directement « d’enlisement » des troupes de l’Alliance atlantique dans le pays. Le quotidien va même jusqu’à faire la comparaison avec l’armée soviétique dans les années 80.

Cependant, Le Figaro et La Croix insistent beaucoup plus sur les divergences de vue entre Paris et Washington quant au devenir de l’alliance. Ainsi, La Croix titre dans son édition du 29 novembre « les États-Unis veulent mondialiser l’Otan » tandis que Le Figaro annonce que « la perspective d’une Otan ‘‘mondiale’’ divise Paris et Washington ». La Croix rappelle que ce sommet « devrait donner du grain à moudre au président américain et à certains de ses alliés » qui souhaitent que l’Alliance atlantique s’intéresse à un nombre croissant de crises à travers le monde ; et obtenir de nouveaux partenariats avec l’Australie, le Japon, la Nouvelle-Zélande, la Corée du sud. Le quotidien catholique commente ainsi : « George W. Bush n’ayant pas abandonné son projet d’étendre la démocratie à travers le monde, les États-Unis comptent sur l’Alliance atlantique pour les épauler ». Et évoque les « réticences » de la France quant à ce projet, citant les propos de Jacques Chirac pour qui « les Nations unies doivent rester le seul forum politique à vocation universelle ».

Le Figaro est nettement plus incisif quand il relate cette divergence de vue, n’hésitant pas à parler de sujet « polémique » et « d’âpre bagarre entre Paris et Washington ». Le Nouvel Observateur parle lui de l’hostilité de Paris à ce projet. Le Figaro relève « qu’en coulisses, l’obstruction de la France a obligé les États-Unis à revoir leurs ambitions à la baisse ». « Ces partenariats ‘‘à la carte’’ que l’Otan veut lancer au cas par cas contrarient Paris » ajoute le quotidien. Il rapporte que Paris va jusqu’à « batailler pour chaque mot » dans la rédaction du communiqué final. Enfin, le Figaro, toujours lui, est le seul à rendre compte d’une « autre polémique » entre les deux grandes puissances : l’inclusion de l’Iran, un des membres de « l’axe du mal » cher à George W. Bush, dans le groupe de contact sur l’Afghanistan que l’Otan cherche à créer.

Mais le fait marquant de ce sommet pour les quotidiens et hebdomadaires nationaux a été le fameux anniversaire du président Chirac, et la polémique suscitée par la proposition du président russe Vladimir Poutine de l’inviter à dîner. Sous le titre « un anniversaire très diplomatique pour Chirac », Le Figaro souligne que Vladimir Poutine a renoncé à ce dîner suite aux protestations américaines. Et rappelle que le président russe est « un ami bien encombrant pour le président français ». Chaque journal y va de son explication quant à la raison de l’annulation de ce dîner. Pour le Figaro, « c’est le président américain [qui] serait intervenu pour contrecarrer ce projet », le pouvoir russe étant « dans l’œil du cyclone après l’assassinat de la journaliste Anna Politovskaïa et l’empoisonnement à Londres de l’ex-agent russe Alexandre Litvinenko ». L’Express souligne la « première diplomatique » qu’aurait représenté ce dîner, aucun président russe en exercice n’étant allé à Riga depuis l’indépendance en 1991 de cette république balte ex-soviétique. L’hebdomadaire donne la raison invoquée par l’Élysée, selon laquelle ce dîner n’a pu avoir lieu « pour des raisons pratiques et logistiques ». Le Monde avance quant à lui que les Américains ont cherché « à minimiser l’affaire, indiquant qu’un dîner d’anniversaire ne concernait en rien les enjeux du sommet de l’Otan ». Il ajoute que « l’annulation de cette rencontre a été décidée par le Kremlin parce que Vladimir Poutine refusait d’introduire une forte dimension bilatérale russo-lettonne à sa visite » et relaye la conviction des officiels lettons pour qui le président russe voulait simplement « faire un coup d’éclat, en manipulant les médias ».